Paris-Roubaix : pourquoi la chicane à l’entrée de la Trouée d’Arenberg ne fait pas l’unanimité
Mise en place pour freiner le peloton et ainsi réduire les risques de chute à pleine vitesse dans la Trouée d’Arenberg, la chicane pourrait s’avérer contre-productive selon certains acteurs du monde du cyclisme.
L’initiative, sur le papier, apparaît intéressante. Mais elle pourrait bien s’avérer contre-productive. À la demande du syndicat des coureurs, l’organisation de Paris-Roubaix a installé une chicane juste avant l’entrée de la Trouée d’Arenberg, l’un des secteurs pavés les plus difficiles de l’Enfer du Nord. Le but ? Ralentir le peloton - qui arrive généralement à plus de 60 km/h dans ce lieu emblématique de la «Reine des Classiques» - afin de réduire les risques de chute à pleine vitesse. Ainsi, juste après avoir passé la voie ferrée, les coureurs devront «contourner l'îlot pour aborder la trouée à une vitesse d'environ 25 km/h», a expliqué à l’AFP le directeur de course Thierry Gouvenou.
« C’est une blague ? »
Mathieu van der Poel
Néanmoins, la mise en place d’un tel dispositif pourrait produire l’effet inverse de celui espéré. C’est du moins ce qu’estiment plusieurs acteurs du monde du cyclisme, comme Thierry Gouvenou : «Je leur (au syndicat des coureurs, ndlr) ai écrit que ça (la chicane, ndlr) pouvait poser des soucis, notamment parce qu'il y aurait un coup de frein plus important. On m'a répondu: on préfère freiner fort au risque de chuter sur du goudron plutôt que d'entrer dans la trouée d'Arenberg à 65 km/h», a-t-il confié à l’AFP. Le directeur de course de Paris-Roubaix n’est pas le seul à penser que l’installation d’une telle chicane n’est pas une bonne idée. Mathieu van der Poel (Alpecin-Deceuninck), vainqueur l’an dernier et grandissime favori de la course cette année, s’est montré très surpris. «C’est une blague ?», a-t-il demandé sur X (ex-Twitter), après avoir visionné les images du dispositif.
« Ça ne peut pas passer sans tomber, pour moi. »
Marc Madiot
Pour Marc Madiot, l’une des légendes de l’Enfer du Nord (vainqueur en 1985 et 1991 chez les professionnels), il est évident que la chicane va engendrer une chute. «Comme elle est foutue là, ça fait un demi-tour sur la route. Donc au lieu que ça tombe sur les pavés, ça va tomber avant, a affirmé à L’Équipe , le manager de la Groupama-FDJ. On est sur une épingle à cheveux sur laquelle les mecs vont arriver à 50 à l'heure, les premiers vont essayer de passer, s'il y en a un qui se loupe, il y en aura 80 dans le même cas. Ça ne peut pas passer sans tomber, pour moi.» En plus, s’il venait à pleuvoir ou si la route venait à être humide, freiner fort sur le passage à niveau serait sans doute très dangereux, surtout pour un peloton de plusieurs dizaines de coureurs.
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Outre une chute au niveau de la chicane, la mise en place d’un tel dispositif pourrait augmenter les risques d’incident en amont. En effet, en abordant la Trouée d’Arenberg a plus faible allure, les meilleurs coureurs auront, de fait, plus de chances de faire de fortes différences. Par conséquent, il devient absolument indispensable - encore plus que d’habitude - pour tous les leaders d’être placés dans les toutes premières positions à l’entrée de la chicane. Le peloton pourrait ainsi être (encore) plus excité qu’à l’accoutumée...Avec tous les risques que cela comprend.
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Malgré tout, la mise en place de ce «ralentisseur» est appréciée par certains coureurs. Comme Matteo Jorgenson (Visma-Lease a Bike), récent vainqueur de Paris-Nice et d’À Travers les Flandres : «Est-ce cela que les fans veulent voir ? Des coureurs complètement couverts de sang après avoir glissé la tête la première à 80 km/h sur des pavés pointus dans une forêt ? Je préfère encore quelques virages et des gars qui glissent sur la chaussée...», a publié sur X (ex-Twitter) l'Américain, qui a agrémenté son post d’une photographie de l’édition 2016 sur laquelle on peut voir l’Australien Mitchell Docker, le visage couvert de sang à la suite d’une chute.
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Dans les prochaines années, une autre initiative pourrait être prise pour réduire la vitesse des coureurs avant la Trouée d’Arenberg : «Dans le long terme on va réfléchir à un dispositif plus fluide mais vu le délai imparti c'était la meilleure solution», a indiqué Thierry Gouvenou. Une chose est sûre, la chicane fait parler. Espérons qu’elle n’en fasse pas autant ce dimanche.
Anonyme
le
Je ne vois pas ce qui empêche la direction de course de figer les positions dans le peloton à 1Km ou 500m et de réguler la vitesse à 30 km/h avec une ou plusieurs voitures qui régulent. Bien mieux que cette chicane.
dariolmp
le
Vu la vidéo, cette chicane est plus dangereuse que l'entrée directe dans la tranchée.